Lisez l’intégralité du discours de Lula après avoir été innocenté

L’ancien président Lula da Silva a prononcé un discours historique dans la ville de São Bernardo do Campo, le 10 mars 2021, deux jours après que la Cour suprême a annulé la procédure pénale à son encontre

Ricardo Stuckert

Lula: "Je veux aider à construire un monde juste"

J´étais assis à ta place et j´avais un peu de mal à distinguer les mots que tu employais, probablement parce que tu portais un masque. Je crois que Soventino est médecin.

Tout d´abord, j´espère que tout le monde ici porte un masque, que tous soient en train de se protéger et que vous soyez tous vaccinés dans les plus brefs délais. J´aimerais demander à ce médecin ici si je peux enlever mon masque pour parler. Je suis à deux mètres de distance et vous avez tous été testés. Vous êtes tous exempts de la maladie. Alors j´aimerais pouvoir enlever mon masque pour vous parler.

Bien, il y a de cela trois ans lorsque j´ai quitté le siège de ce syndicat pour me rendre à la Police Fédérale. Je l´ai fait, évidemment, contre ma volonté car je savais qu´ils étaient en train de jeter en prison un innocent. Beaucoup de ceux qui étaient ici ce jour là ne voulaient pas que je me rende.

J´avais pris la décision de me rendre car il ne serait pas correct qu´un homme de mon âge, qu´un homme qui se valait d´une histoire édifiée à vos côtés, puisse apparaître en première page des journaux et à la télé comme un fugitif.

De plus, je n´avais aucun doute sur les mensonges que l´on racontait à mon égard. J´ai alors pris la décision de prouver mon innocence au sein même du siège de la Police Fédérale, juste à côté du juge [Sergio] Moro.

Avant d´y aller nous avions écrit un livre. C´est moi qui avait décidé du titre du livre, La Vérité Vaincra. J´étais si confiant et conscient de ce qui se passait au Brésil que j´étais sûr que ce jour adviendrait. Et il est venu.

Je voudrais vous dire que je suis né politiquement dans ce syndicat. En 1969, je suis devenu délégué de base de ce syndicat, lorsque je travaillais dans l´entreprise Villares. En 1972, je suis devenu premier secrétaire et je prenais soin de la sécurité sociale. En fait, je prenais soin des petits vieux ici.

En 1975 je suis devenu président, en 1978 nous avons lancé les premières grèves après les grèves de Osasco et Contagem, en 1968. Et vous connaissez déjà l´histoire qui s´est suivie. Beaucoup de mouvements ici présents ont ensuite été créés et j´ai participé à la presque totalité d´entre-eux.

Le mouvement le plus important a été de prendre conscience que je ne pourrais pas résoudre les problèmes du pays qu´à travers le syndicat. Je pourrais, dans la meilleure des hypothèses, arriver à un acquis dans l´usine, mais c´était une lutte trop économiciste. Celle que tu gagnes aujourd´hui et perds demain avec l´inflation. C´est celle que tu penses gagner et puis, presque à la suite, l´entreprise ferme ses portes – comme l´a fait Ford ici – sans rendre des comptes à quiconque.

La souffrance qu´endurent les pauvres de ce pays est infiniment plus grande que n´importe quel crime qu´ils aient commis contre moi. C´est plus intense que n´importe quelle amertume que j´aie pu ressentir lorsque j´étais emprisonné au siège de la Police Fédérale.

J´avais perçu alors la nécessité d´entrer en politique et de bâtir une conscience politique dans le pays. Je dis toujours que si je suis en politique, ce n’est que grâce à la conscience politique de la classe ouvrière brésilienne. Lorsqu´elle a évolué, moi aussi je l´ai fait. Et je pense que ceci justifie l´invitation que je vous ai faite pour que vous soyez présents ici.

Parce que toutes les personnes qui ont été invitées à être présentes en ce jour, sont celles qui étaient ici lorsque je devais aller à la Police Fédérale, ce sont celles qui croyaient déjà avant et qui ont continué de croire en mon innocence et c´est la raison pour laquelle j´ai tenu à vous inviter ici. Il manque, bien évidemment, un coordinateur ou une coordinatrice de la Veillée de Soutien de Curitiba qui a été l´une des choses les plus extraordinaires de ma vie.

Quand j´ai décidé de programmer cette entrevue de presse, beaucoup se sont inquiétés de mon état d´esprit. « Comment sera Lula ? Sera-t-il fâché ? Est-ce qu´il insultera quelqu´un ? Prononcera t-il des mots d´espoir ? »

Et parfois je me sentais comme dans cette histoire d´un esclave que j´ai lue dans un livre. L´esclave a été condamné à être fouetté 100 fois. Une fois que le fouettard l´avait frappé pour la 98ème fois, il lui a dit : « J´arrête de te fouetter si tu remercies ton maître. Si tu remercies ton maître, je ne te frapperais plus des deux derniers coups qui manquent. » Et l´esclave a répondu : « Comment puis-je remercier ? Je suis déjà complètement brisé. Pourquoi devrais-tu t’arrêter? Vas-y, fouettes-moi encore deux fois. »

Alors s´il y a un citoyen qui a le droit d´être attristé par les coups de fouet, c´est bien moi. Or, je ne le suis pas. Les gens pensent qu´après avoir frappé du fouet il suffirait de mettre un peu de sel et de piment sur les plaies et la personne battue se guérirait avec le temps. Pour eux, les cicatrices que les gens en gardent après, leur importent bien peu.

Tout ce que je sais, c´est que j´ai été victime du plus grand mensonge juridique raconté en 500 ans d´histoire. Et que ma femme, Marisa, est morte du fait de cette pression, son AVC s´étant accéléré.

J´ai été interdit de rendre visite à mon frère lorsqu´il se trouvait déjà dans son cercueil, parce qu´ils ont pris la décision de me faire venir à São Paulo, de m´emmener au 2ème bataillon de l´Armée, au quartier de l´Ibirapuera et que c´était à mon frère qui, depuis son cercueil, devait venir me visiter. Ils n´ont pas manqué non plus d´interdire toute prise de photo.

Alors, s´il y a un brésilien qui aurait raison de se sentir profondément et énormément meurtri ce serait bien moi. Mais, sincèrement, je ne cultive pas de chagrin car la souffrance qui s´abat sur le peuple brésilien, cette épreuve qui est imposée aux pauvres est infiniment plus grande que n’importe quel crime qu´ils ont commis contre moi. Elle va bien au-delà de toute la peine que je ressentais lorsque j´étais prisonnier à la Police Fédérale.

Parce qu´il ne peut exister de plus dure épreuve pour un homme ou pour une femme, quel que soit le pays où il vive, que de se lever le matin et ne pas savoir s´il aura le droit à un café et à une tartine beurrée pour débuter sa journée. Il n´y a pas de peine plus lourde pour un être humain que d´arriver à l´heure du déjeuner et de ne pas disposer d´un plat d´haricots avec de la farine pour en donner à son fils. Rien n´est plus douloureux pour un citoyen que de savoir qu´il est au chômage et qu´à la fin du mois il ne recevra pas de salaire pour subvenir à sa famille.

C´est cette peine qui s´abat sur la société brésilienne actuellement qui me fait dire que la douleur que je ressens n´est en rien comparable à la douleur dont souffrent des millions et des millions de personnes.

Elle est infiniment inférieure à la peine subie par les presque 270 mille personnes qui ont perdu leurs proches. Leurs parents, leurs grand parents, leur mère, leur épouse, leur mari, leurs petits-fils et qui n´ont même pas pu dire adieu à leurs chéris au moment qui est, pour nous, le plus sacré: la dernière visite et le dernier regard présent sur le visage de ceux que nous aimons.

Et nombreux sont ceux qui souffrent toujours. C´est pour cela que je voudrais exprimer ma solidarité et ma compassion, à l’ occasion de cette rencontre, aux familles des victimes du coronavirus. Au personnel soignant, particulièrement, qu´il travaille dans le système de santé public ou privé.

Mais surtout aux héros et héroïnes du Système de Santé Public (SUS) qui durant tout ce temps ont été discrédités politiquement. Ils ont été discrédités dans l´exercice de leur profession. De fait, n´étaient mises en avant que les carences dont souffrait le SUS et quand la pandémie est venue, si ce n´était pas le SUS, nous aurions perdu beaucoup plus de gens que nous n’en avons perdu. Et ceci en dépit de tout l´argent que le gouvernement a retiré du SUS et de la complète incurie de ce gouvernement en ce qui concerne la santé.

Vous savez que la question du vaccin n´est pas subordonnée au fait d´avoir ou pas de l´argent. C´est une question d´amour à la vie ou à la mort. C´est une question de savoir quel est le rôle d´un président de la République dans le soin qu´il est censé apporter à son peuple. Car un président n´est pas élu pour dire des bêtises ou diffuser des fake-news. Il n´est pas élu pour stimuler l´achat d´armes, comme si nous avions besoin de plus d´armes.

Ceux qui ont besoin de plus d´armes ce sont nos forces armées. Des armes à feu c´est notre police qui en a besoin, elle qui sort, trop souvent, pour combattre la violence dotée d´un vieux revolver calibre 38 tout rouillé. Ce n´est pas la société brésilienne.

Ce ne sont pas les fermiers qui ont besoin des armes à feu pour tuer des sans-terres ou pour tuer des petits propriétaires. Ce ne sont pas les miliciens qui ont besoin de plus d´armes pour terroriser les banlieues de ce pays. Pour tuer des enfants, surtout des enfants noirs, qui sont les plus grandes victimes des armes à feu et de leurs balles perdues dans ce pays.

Sans doute, nous traversons un moment délicat. Et je voudrais vous en dire quelques mots. Mais avant, j´aimerais donner suite à mes remerciements, Wagner.

Tout d´abord, j´aimerais te remercier toi, encore une fois, ce syndicat, pour avoir cédé cet espace démocratique afin que nous puissions tenir cet échange.

Je ne pourrais pas manquer de remercier aussi Alberto Fernandez, lorsqu´il briguait le mandat à la présidence de son pays contre l´extrême droite, qui a eu la décence, le courage d´aller à la Police Fédérale de Curitiba me visiter. Mais non seulement. Je lui avais demandé de ne pas concéder d´entrevue afin de ne pas se faire attaquer par la droite en Argentine. Il m´a dit : « Lula, je ne me soucie pas du tout de ce que dira la droite. Pour moi, l´important c´est ce qui m´amène ici. Je viens t’exprimer ma solidarité, car je considère que tu as été victime du plus grand mensonge politique jamais conçu en Amérique Latine. »

Alors, au président Alberto Fernandez qui a été le premier à m´appeler après la décision du juge Fachin, et à tout le peuple argentin solidaire, mes remerciements.

Mes remerciements à notre cher pape François. Non seulement parce qu´il a envoyé un messager me visiter à Curitiba et me remettre une lettre, messager que la Police Fédérale n´a pas laissé entrer car elle l´a pris pour un « imposteur », affirmant qu´il n´était pas le représentant du pape, or il l´était. Ensuite j´ai reçu la lettre que m´avait envoyée le pape, outre ses si belles déclarations, formulées à plusieurs reprises.

Et le fait que le pape ait eu le courage de me recevoir au Vatican, l´occasion que nous avons eue d´avoir une longue conversation, pas sur mon cas en particulier, mais sur la lutte contre l´inégalité qui est le plus grand fléau qui plane actuellement sur la planète Terre, une planète qui est bien ronde, qui n´est pas rectangulaire ou carrée. Et Bolsonaro n´en est toujours pas au courant !

Il me semble donc important de toujours pouvoir l´affirmer : la planète Terre est ronde ! Il possède un astronaute au gouvernement. Le ministre Pontes, de la Science et Technologie l´a survolée dans une fusée russe lorsque j´étais président. S´il n´était pas endormi à cette l´occasion, il aurait bien vu qu´elle était ronde.

Il pourrait alors dire à son président : «Oh, président, il ne faut plus dire de telles sottises ! Il ne faut pas se fier à ce nommé Olavo de Carvalho, voyez-vous ? Assumez que la terre est ronde ». Eh bien, je suis reconnaissant car le pape François est indéniablement le religieux le plus important que nous avons en ce moment.

J´aimerais remercier certains, particulièrement le camarade Aloizio Mercadante, du Groupe de Puebla. Les leaders de toute l´Amérique Latine qui ont été solidaires et ont cru en mon innocence. Je veux remercier le Forum de São Paulo qui est une organisation de la gauche latino-américaine. Et je veux remercier plusieurs leaders politiques. Je ne pourrais oublier de citer ici le camarade Pepe Mujica, ex-président de l´Uruguay, l´une des personnes les plus extraordinaires que j´aie jamais connues.

Je ne pourrais pas ne pas relever ici la solidarité de Bernie Sanders, un camarade sénateur des États-Unis, presque candidat à la présidence de la République américaine et qui a pris ses distances avec la campagne électorale.

J´aimerais louer, avec beaucoup d´affection, le comportement courageux de la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui candidate à sa réélection, à un moment où la droite publiait des articles dans les journaux disant qu´elle allait perdre ces élections du fait de m´avoir fait venir, m´a dit : « Lula, pour moi la solidarité vaut plus qu´une élection. Je t´ai emmené ici pour t´accorder le prix du Citoyen [d´Honneur de la Ville] de Paris et je vais gagner les élections en raison de mon geste ». Et elle a remporté les élections. C´est pour cela que j´aimerais remercier notre chère maire de Paris.

Mes remerciements au camarade [José Luis Rodríguez] Zapatero, au camarade Evo Morales, à la religieuse bouddhiste Coen Roshi, à notre cher Martinho da Vila, à notre cher Chico Buarque, notre cher Noam Chomsky, l´un des plus grands intellectuels vivants à cette date, de toute l´humanité.

Je veux remercier mon cher petit vieux…Avant de mentionner son nom, ce camarade a passé quatre ans voulant faire don à la USP [Université de São Paulo] d´une ferme qu´il avait à l´intérieur de São Paulo, pour qu´elle en fasse un campus là-bas. L´Université a passé quatre ans sans lui répondre. Quand finalement un jour il est venu me voir, par le biais de l´un de ses assistants, me faisant part de son souhait de faire don de sa ferme pour la transformer en une université.

La prison ne m´a pas causé la souffrance à laquelle je m´attendais car je ne sais combien de prisonniers dans l´histoire de l´humanité ont eu tellement de gens à leurs côtés.

 

En moins de vingt heures le camarade Fernando Haddad – qui est ici présent – a accepté le terrain et nous l´avons accueilli. Et ce camarade, c´est avec lui que j´ai eu le plaisir de visiter l´Université déjà en activité. Je ne sais pas en quel état se trouve-t-elle après la destruction de [Michel] Temer et de Bolsonaro, mais celui dont je vous parle, c´est mon cher camarade Raduan Nassar. Camarade qui a dépassé la barre des 80 ans.

J´aimerais dire merci à mon camarade, mon biographe, qui ne finit jamais mon livre, le camarade Fernando de Morais. J´aimerais témoigner de la reconnaissance à Martin Schulz, ministre en Allemagne, représentant la social-démocratie. À Roberto Gualtieri, du Podemos espagnol et à l´ex-premier ministre italien [Massimo] D´Alema.

J´aimerais remercier de tout cœur tous ceux de la Veillée de la Liberté. Il y a ici beaucoup de gens qui se sont rendus à la Veillée, qui sont restés longtemps à la Veillée, et il faut dire que ces personnes ont alors fait face aux folies de la Police Fédérale.

Il y avait notamment un commissaire, je ne sais s´il avait tous ses esprits, s´il était sous l´impact de l´alcool, mais il provoquait la Veillée. Il est allé jusqu´à tirer pour faire peur à la Veillée.

Il y avait la police, il y avait des voisins qui offensaient les gens de la Veillée à longueur de journée. Et ces gens sont restés là-bas 580 jours ! Chaque jour, de dimanche à dimanche, le matin ils criaient « président Lula ! », lors de leur déjeuner, à quatorze heures, ils criaient à tue-tête « président Lula !». Lorsqu´il était sept heures du soir, ils criaient « président Lula ! ». Tous les jours que Dieu fait. Je me levais, déjeunais et m´endormais avec ces femmes et hommes venus de tout le Brésil scandant mon nom.

C´est la raison pour laquelle, la prison m´a été moins accablante de ce que je m´attendais, parce que je ne sais combien de prisonniers dans l´histoire de l´humanité ont pu compter sur tellement de gens.

Et là je me dois de remercier le mouvement syndical. Dire merci à João Paulo, au Mouvement des Sans-Terres car le camarade Baggio, du Paraná, a été un héros.

J´aimerais témoigner de ma reconnaissance aux camarades du MAB [Mouvements des Rescapés des Barrages] qui ont travaillé de façon extraordinaire et aux camarades des partis de gauche qui sont ici. Lamentablement je ne connais pas le nom de toutes ces personnes mais je me dois de les remercier.

Avant de remercier mes avocats et les autres avocats qui, n´étant pas les miens dans le procès, l´ont été à part entière, en participant de la chaine de solidarité ils ont beaucoup travaillé pour notre pays.

J´aimerais dire merci à une personne que je ne connais pas encore, mais qui s´appelle Claudio Wagner. C´est lui l´expert qui est en train de parcourir tous les messages du hacker pour prouver la véracité de notre accusation.

Ce qui est intéressant c´est que durant cinq longues années, de larges secteurs de la presse n´ont exigé aucune véracité du juge Moro. Avant de répandre les mensonges qu´ils racontaient à mon sujet, ils n´ont soumis au crible de la véracité aucun des procureurs, ni encore moins la Police Fédérale.

Mais maintenant nous avons un expert qui dépouille les documents qui se trouvent à la Police Fédérale. Par conséquent, ce n´est pas une affaire du Parti des Travailleurs mais de la Police Fédérale, autorisée par la Cour Suprême. Et même avec l´aval de cet expert, vous voyez ce qu´en dit la presse.

Ça me fait drôle car le juge Moro a coutume de parler en ces termes « je ne reconnais pas cette véracité ». Les procureurs, débitent également , « nous ne la reconnaissons pas », et ceci tout en sachant qu´il y a une expertise et que sa diffusion a été autorisée par la Cour Suprême.

En ce qui me concerne, ils n´ont jamais demandé l´autorisation. C´était bizarre car très souvent je me présentais à l´interrogatoire et la plus grande préoccupation du commissaire de police n´était pas la question en soi mais la fuite à la presse. Et la fuite était bien triée sur le volet.

Il y avait un journaliste dédié à ça dans le journal Folha, un journaliste spécifique dans le quotidien Estadão, un journaliste « spécialisé » dans les revues Época, Veja, IstoÉ ; des journalistes voués à ça dans toutes les chaines de télé. Tout le monde s´en rappelle.

Dans combien de matières du principal journal télévisé n´apparaissait pas l´image d´un oléoduc, d´un gazoduc duquel sortait de l´argent, pour ensuite faire état, vingt ou trente minutes durant, des plaintes vides de preuves des procureurs.

Mais malgré tout, ils allaient de l´avant. Contre Lula, il n´était pas nécessaire de prouver que le document était fiable. Il fallait le détruire. En fin de compte, un tourneur-fraiseur manquant d´un doigt avait trop fait dans ce pays. Il fallait éviter à tout prix qu´il puisse de nouveau gouverner le pays.

Parce que l´Amérique Latine n´a jamais appliqué, durant 500 ans, une politique d´inclusion sociale. L´inclusion sociale, elle, ne doit inclure que 35% de la société. Ceux qui peuvent fréquenter un théâtre ne représentent qu´une petite partie de la société. Ceux qui vont au cinéma constituent aussi une minorité. Ceux qui vont au restaurant, un groupe sélect. Ceux qui fréquentent les jolis parcs, qui vont aux vernissages dans ce pays, qui fréquentent les expositions, ne sont qu´un petit groupe de personnes.

Pour la majorité, qu´elle reste là où elle est. Le tout et pour tout, un travailleur, ça se doit de travailler. Et le rôle des pauvres c´est d´attendre les politiques d´aides sociales du gouvernement, lorsqu´elles existent.

De ce fait, je vous le dis, la journée d´avant-hier a été très gratifiante pour moi. Je suis reconnaissant au ministre Fachin car il a accompli ce que nous revendiquions depuis 2016.

La décision qu´il a prise, tardivement, cinq ans après, était mise en avant par nous depuis 2016. Nous l´avons répété sur tous les tons : l´inclusion de Lula et l´inclusion de la Petrobras dans la vie de Lula répondaient à un objectif précis du gang des procureurs de l´Opération Lavage Express, pas du Parquet. Le gang des procureurs du task-force et le juge Moro comprenaient que l´unique manière de m´attraper serait à travers l´opération Lavage Express, parce que j´avais déjà été acquitté dans plusieurs autres procès en dehors de la Lavage Express. Ils avaient pour obsession de me criminaliser car ils voulaient créer un parti politique.

J´étais très heureux parce qu´après tant de mensonges véhiculés sur moi, hier [mardi] je pense que nous avons eu un journal télévisé épique à la chaine Globo. Hier, ceux qui étaient face à la télé, ne croyaient pas leurs yeux. Pour la première fois la vérité a prévalu.

Dite, non pas par quelqu´un du PT, dite par le président de la deuxième chambre de la Cour Suprême Fédérale à travers le discours du juge de la Cour, Gilmar Mendes ; dite par un autre juge de la Cour, Ricardo Lewandowski, et dite également par la juge Carmem Lucia qui n´aurait, à ses dires, jamais vu rien de pareil (concernant les déboires de l´opération Lavage Express).

Et moi, ayant déjà parcouru tant de choses, j´étais heureux de voir enfin la vérité émerger, car c´est à cela que servent les moyens de communication. Un journaliste se doit d´être indépendant, il ne va pas sur le terrain juste pour mettre à l´œuvre les ordres de son éditeur.

Vous n´avez pas idée, dans cette salle il n´y a personne qui ait eu 10% du vécu que j´ai eu moi-même avec la presse. Depuis 1975 j´ai affaire à la presse, avec la presse en masse. Et j´ai toujours dit que le rôle de la presse, lorsque le journaliste gagne la rue, il y va de son engagement à dire la vérité. La vérité nue et crue.

Peu importe si elle va à l´encontre du PT, du PC do B, du PSOL ou du PMDB, contre n´importe qui. La vérité nue et crue, c´est pour cela que nous avons besoin d´une presse libre.

Nous ne voulons pas d´une presse qui ne répand que ce qui l´arrange idéologiquement ou politiquement. L´idéologie qui se cache derrière la nouvelle du journal, de la télé ou de la revue doit être mise de côté, ou alors être véhiculée dans l´éditorial, en tant que prise de position du média en question. Mais vous journalistes, vous vous devez d´être libres. Votre engagement c´est celui d´écrire ce que vous avez vu. C´est d´écrire ce que les personnes vous ont dit, et non pas ce que votre éditeur désire vous voir écrire.

J´étais donc heureux car j´espère que la vérité, la version présentée par Globo hier, redevienne, dorénavant, son nouveau standard de comportement face à la vérité.

La chaine Globo n´a pas à aimer ou à ne pas aimer un président. Elle n´a pas à aimer ou ne pas aimer un parti politique. Cette décision, elle doit la prendre au moment du vote. Mais lorsqu´elle informe, elle se doit de faire connaitre la vérité et seulement la vérité.

Et hier j´étais heureux de voir la vérité proférée en intégrale par deux ministres de la Cour Suprême. J´espère que ça continue. Car, auparavant, Gilmar [Mendes] également n´était pas montré à l´antenne. Lewandowski, lui non plus, n´apparaissait pas. Ce n´étaient que les accusateurs qui occupaient le plateau durant une demi-heure et, parfois, si jamais Gilmar et Lewandowski votaient contre les accusateurs, ils avaient droit à 30 secondes.

Nous allons continuer de nous battre pour que le juge Moro soit considéré suspect. Parce qu´il n´a pas le droit d´occuper le rôle du plus grand menteur de l´histoire brésilienne et être considéré comme un héros par tous ceux qui veulent m´inculper. Un colosse aux pieds d´argile ne fait pas long feu.

Ce n´est même pas la peine d´évoquer mes avocats car l´effort déployé pour qu´ils apparaissent au moins 30 secondes à l´antenne était monumental et même ainsi ils n´y étaient presque jamais montrés. Malgré tout, je continue à affirmer que la liberté de la presse est l´un des fondements majeurs du maintien de la démocratie dans n´importe quel pays du monde, dans n´importe quel lieu de la planète Terre.

Alors, chers camarades, j´aimerais dire merci à mes avocats. C´est drôle, mes avocats n´étaient pas criminalistes et j´ai été plusieurs fois poussé à embaucher quelqu´un de célèbre. Quelqu´un qui ait été très important, de l´ordre d´un ex-ministre, quelqu´un qui ait été…

Je disais toujours que pour défendre la vérité, je n´en avais pas besoin. On m´a demandé une fois de m´adresser à une personne et elle m´a dit : « Je peux participer, mais je demande 3 millions de reais». Là, je me suis dit que si quelqu´un me demandait 3 millions de reais pour me défendre et que si je venais à accepter, ce serait déjà une preuve de ce que je suis un voleur. Où pourrais-je trouver 3 millions de reais pour payer un avocat ?

J´aimerais dire à mon cher Cristiano Zanin et à ma chère Valeska Teixeira et à tous ceux qui composent mon équipe d´avocats, un très grand merci! Car le résultat de lundi n´a été possible que grâce à leur courage.

Vous vous souvenez, lorsque j´avais dit que je ne cèderai pas ma dignité en échange de ma liberté et que ma cheville n´était pas une cheville de pigeon. Je me suis refusé de porter un bracelet électronique de cheville, de rentrer à la maison dans la condition de détenu car ma maison n´était pas une prison. Trop de gens se sont dit que je ne faisais que radicaliser, que je ne faisais qu´exprimer mes sentiments. Mais moi, j´étais sûr que ce jour arriverait.

Et il est arrivé avec le vote du juge Fachin qui a reconnu que je n’avais jamais commis de crime, que je n´avais jamais été impliqué dans la Petrobras. Et tout le chagrin que j´avais ressenti, toute la souffrance qui m´a terrassé est passée.

Je suis très serein. Le procès se poursuivra? Oui, sans doute. Ça ne me fait pas peur, j´ai été acquitté de tous les procès qui ne passaient pas par Curitiba. Nous allons continuer de lutter pour que le juge Moro soit considéré suspect. Parce qu´il n´a pas le droit de devenir le plus grand menteur de l´histoire du Brésil et être toujours considéré comme héros par tous ceux qui voudraient m´inculper. Je répète, un Colosse aux pieds d´argile ne dure pas longtemps.

Je suis sûr qu´il souffre aujourd´hui beaucoup plus que je n´ai souffert. Je suis sûr que le [procureur Deltan] Dallagnol doit souffrir beaucoup plus que je n´ai souffert. Parce ce qu´ils sont conscients d´avoir commis des fautes graves et que moi je n´en avais pas sur ma conscience.

Alors, tous mes remerciements à mes avocats. Mes remerciements à tous les avocats du Brésil qui ont été solidaires avec moi. Tous. Il y a eu énormément de gens qui ont été solidaires avec moi, il y a eu énormément de manifestes signés, et je suis sincèrement reconnaissant à tout le monde.

Je veux remercier. Avant de le faire, j´aimerais vous raconter que j´avais eu dans le temps un avocat très important. Quand a été publiée la nouvelle du triplex, cet avocat m´a dit la chose suivante : «Oh Lula », l´un des plus grands criminalistes du Brésil, « Oh Lula, voilà ce dont il s´agit : tu n´as pas à t´en faire avec cette histoire de triplex, parce qu´il n´y a aucun fondement dans cela. Ça ne prospèrera pas. Ça n´avancera pas. »

Ils ont inventé un offshore au Panama, ont inventé une businesswoman de l´offshore pour dire que cette entrepreneure aussi bien que cet offshore étaient impliqués avec l´OAS et la Petrobras et qu´ils devaient par conséquent me condamner.

Et l´affaire du triplex qui n´avançait pas, pour laquelle ils n´ont jamais présenté un seul document, pas même un centime, c´est ce qui a conduit à ma condamnation à neuf ans de prison. Outre le paiement d´une amende qui vaut cinquante fois la valeur de l´appartement.

C´est une lutte titanesque contre un gouvernement incompétent, contre un ministre de la Santé incompétent et contre des personnes qui ne respectent pas la vie. Alors, aux gouverneurs, toute ma solidarité.

Maintenant, c´est Boulos[1] qui est devenu victime de cet appartement, il est actuellement inculpé pour l´avoir occupé durant quelques heures. C´est drôle parce qu´en tant que supposé propriétaire, ce n´est pourtant pas moi qui ait attaqué Boulos en justice. Alors, j´aimerais bien savoir qui poursuit ce garçon en justice, ce garçon qui a envahi un appartement qu´ils affirmaient m´appartenir…Et ce n´est pas moi qui l´ait attaqué, mais un autre qui l´a fait…

En ce qui me concerne, Boulos, tu sais que tu as toute ma solidarité. Si jamais un jour nous nous voyons obligés d´envahir, pour toi, eh bien, nous le ferons.

J´aimerais saluer également ma chère Gleisi Hoffmann qui a eu un rôle, non seulement en tant que présidente du parti, mais également en défense du PT et de ma personne.

Vous savez combien c´est difficile. Je ne souhaite à quiconque d´avoir ce déplaisir de voir son visage à la une des journaux, accusé d´un crime quelconque. Vous verrez très vite les nombreuses personnes que vous considériez vos amies disparaître à la vitesse de la lumière. Vous passerez des semaines ou des mois sans recevoir un seul coup de fil.

Des gens qui étaient après vous, 24 heures par jour, disparaitront subitement. Je ne souhaite à personne de subir ce désagrément, c´est la raison pour laquelle, lorsque j´étais président, j´ai fait trois discours lors de nominations de procureurs. À Paulo Okamoto je disais considérer le Ministère Public une institution très importante, si importante, qu´il est impératif que ce ou celle qui sera nommé procureur soit une personne très honnête et sérieuse.

On ne peut pas tout simplement rendre public le nom des gens avant d´en avoir la preuve. Il est impensable d´essayer de criminaliser les personnes avant de prouver qu´elles ont commis un crime. Et c´est ce qui s´est passé. L´opération Lavage Express a fait un pacte avec les médias. Ils le jugeaient nécessaire car selon la théorie de Moro, dans un article qu´il a écrit en 94, « il n´y a que la presse qui puisse aider à condamner les personnes. » L´engrenage du « tout est permis » était lancé.

Alors je veux témoigner de ma reconnaissance à Gleisi, pour tout ton effort Gleisi, toi qui est camarade, avocate et présidente du Parti. Je veux dire merci au camarade Fernando Haddad qui allait me visiter comme avocat, ce n´était pas en tant que camarade du PT, il y allait dans le rôle d´avocat. Rui Costa, mon camarade de Parti, venait me voir comme avocat, même situation pour Emilio.

Je me suis fait deux amis extraordinaires, des personnes que je ne connaissais pas, deux avocats de Curitiba qui m´ont rendu visite 580 jours, sans exception. L´un venait le matin et l´autre l´après-midi. Exception faite aux samedis et aux dimanches. Imaginez ce que c´est que deux personnes qui viennent me voir jour après jour.

L´un arrivait avec mon déjeuner, envoyé par Janja[2] et l´autre arrivait l´après-midi avec mon dîner préparé par Janja. Parfois la nourriture arrivait froide mais je mangeais et ne m´en plaignais pas car je savais que dehors les gens avaient faim. J´arrivais à la réchauffer car j´avais un petit dispositif qui me permettait de le faire. Un manœuvre d´usine sait comment réchauffer sa marmite. C´est ainsi que je n´ai pas mangé de marmite froide, je la consommais toujours bien chaude.

Une fois, Janja m´avait envoyé une soupe dans une bouteille thermique. Je pense que la soupe a continué de cuire dans la bouteille et du coup elle ne ressortait plus. Les grains enflaient, je crois que c´étaient des lentilles. Les grains ont pris du volume dans la bouteille et je n´arrivais pas à les extraire. Mais je les ai fait sortir avec la cuiller, petit à petit, je tapotais le fond de la bouteille thermique jusqu´à ce qui n´était plus une soupe, en ressorte, mais il faut dire que je l´ai appréciée quand même.

Je veux exprimer toute ma reconnaissance aux gouverneurs Rui Costa, Wellington Dias, Camilo Santana, Fátima Bezerra et tous les gouverneurs du Nord-Est qui sont en train de se battre – sans compter tous les autres – pour que les brésiliens soient vaccinés.

C´est une lutte ingrate, colossale, contre l´incurie d´un gouvernement incompétent, contre un ministre de la Santé incompétent et contre tous ceux qui n´accordent pas de valeur à la vie. Donc, à tous les gouverneurs, j´exprime ma solidarité.

Mon grand merci à tous les camarades des centrales syndicales, à tous les camarades des partis politiques ici présents, une preuve de reconnaissance à tous les mouvements sociaux, à la CUT, la Force Syndicale, la CGTB, le MST, le MTST, aux camarades de l´Union des Étudiants (UNE) qui ont eu un rôle extraordinaire durant toute la période où j´ai été au pouvoir.

De même, je ne pourrais oublier de vous remercier, vous tous de la presse brésilienne, car, après tout ce que j´ai dit ici, vous pouvez être sûrs que João Roberto Marinho n´est pas plus attaché à la presse que moi-même. Il ne pourrait pas non plus me devancer dans la défense acharnée de la démocratie dans la presse. Quand au président de la République, n´en parlons pas.

Mes remerciements à vous tous. Car je sais que vous allez continuer de travailler pour essayer de restaurer le rôle de la presse dans la construction de la démocratie brésilienne.

Chers camarades, j´ai longuement réfléchi sur ce que je voulais vous dire ici aujourd´hui. Hier je suis resté jusqu´aux environs de minuit ébauchant quelque chose, coupant des extraits, les changeant et j´en suis venu à conclure que je me devais de discuter avec vous sur la situation de notre pays. Ce serait une grave erreur de ma part de ne pas vous exprimer ouvertement mon sentiment : le Brésil ne mérite pas ce sort impitoyable qui l´accable.

J´ai 75 ans. Je rigole en disant que j´ai l´énergie d´un trentenaire et suis passionné comme un jeune de 20 ans. Je crois que c´est la raison pour laquelle je n´ai pas encore été vacciné car ils n´arrivent pas à décider de la tranche d´âge à laquelle j´appartiens. Si c´est celle des 30, 20 ou 75. Pour l´heure je dis que c´est celle des 75 et si Dieu le veut, la semaine prochaine je serai vacciné. Je veux recevoir ma dose de vaccin. Peu m´importe l´origine du vaccin, peu m´importe s´il s´agit d´un ou de deux vaccins ; je prendrai mon vaccin et je veux en faire la publicité au peuple brésilien.

Surtout, ne suivez aucune décision imbécile du président de la République ou du ministre de la Santé. Vaccinez-vous. Prenez le vaccin car le vaccin c´est l´une des choses qui pourra vous épargner du Covid-19.

Et, encore que vous ayez été vaccinés, il ne faut surtout pas en déduire que vous pourrez juste après vous dénuder et aller au bar du coin prendre votre bière bien fraîche et papoter. Non ! Vous devez continuer à respecter l´isolement et vous devez continuer à utiliser le masque et le gel hydroalcoolique. Pour l´amour de Dieu !

Ce virus a tué cette nuit presque deux mille personnes. En fait, les morts sont en train d´être rendus presque naturels car on en fait état du matin au soir. Lorsque nous écoutons une chaine de télé, lisons un journal, ouvrons la radio, c´est toujours de la mort dont on parle, alors la mort finit par prendre une allure presque naturelle dans l´esprit des gens, mais ce sont des morts qui auraient pu être pour la plupart évités si l´on avait eu un gouvernement qui avait fait le minimum.

Comme vous le savez bien, l´art de gouverner n´est pas facile ; c´est l´art de savoir prendre des décisions. Alors, n´importe quel président de la République qui se respecte et qui respecte le peuple brésilien, la première chose qu´il aurait faite en mars de l´année dernière c´était de créer un Comité de Crise.

Un Comité qui réunisse son ministre de la Santé, les secrétaires de la Santé des États, qui intègre les scientifiques de la Fiocruz, du Butantã et d´autres scientifiques. Un Comité qui oriente la société brésilienne sur la procédure à suivre de façon hebdomadaire.

Il fallait prioriser l´argent et acheter les vaccins disponibles au niveau mondial. Par moments, on nous a offert des vaccins que nous n´avons même pas accepté. Pfizer a essayé de nous en offrir et nous n´avons pas accepté, l´Organisation Mondiale de la Santé l´a fait également.

Tout ceci parce que nous avons un président qui a inventé une certaine chloroquine…Nous avons un président qui dit que ceux qui ont peur du Covid-19 sont des tantouses, que le Covid-19 est une gripette, une affaire de lâches, qu´il est ex-athlète et que par conséquent il ne s´infectera jamais. Il ne tient pas son rôle de président de la République dans un monde civilisé.

Un président de la République qui se respecte devrait avoir ce Comité de Crise et recevoir toutes les semaines un conseil officiel du Comité, orientant la société, visitant les États, les villes, s´informant des conditions des hôpitaux, travaillant dur pour construire des hôpitaux provisoires là où il n´y en a pas. Un président qui essaye par tous les moyens d´éviter le manque d´oxygène qui s´est produit à Manaus. C´est ça le rôle d´un président de la République.

Mais lui, il ne sait pas ce que c´est d´être président de la République. Lui qui durant toute sa vie n´a rien été. Il n´a même pas pu devenir capitaine. II était lieutenant et a été promu capitaine du fait de sa retraite. Une retraite, par ailleurs, anticipée car monsieur voulait faire exploser une caserne de l´armée étant devenu dirigeant syndical des soldats et demandant une augmentation de salaire.

Une fois sa retraite sur la table, il n´a plus rien fait dans la vie. Il a été conseiller municipal et député durant 32 ans. Dans l´exercice de son mandat il a réussi à faire passer à la société l´idée qu´il n´était pas un politicien.

Avez-vous imaginé la puissance, la force du fanatisme ? À travers les fake-news, le monde a élu Trump. Avec les fake-news, le monde a élu Bolsonaro.

Votre mère ou votre père ont déjà dû vous dire un jour : « Mon fils, le mensonge peut faire le tour de la terre le temps que la vérité mette ses chaussures ». Ce qui signifie que le mensonge a beaucoup plus de force, parce qu´il est plus facilement crédible. La vérité vous devez l´expliquer, le mensonge non.

J´ai appris ces jours-ci qu´il y a 50 millions de personnes dans le monde qui croient que la terre est plane. Vous vous rendez compte de la folie qui s´empare de ce pays ?

Beaucoup de morts auraient pu être évités, beaucoup. Par ailleurs, le rôle des églises [évangéliques] est celui d´aider à orienter les gens, et non pas de vendre des grains d´haricot ou de faire des cultes avec des fidèles sans masque tout en disant qu´elles détiennent la clé de la guérison.

Je crois dans le pouvoir salvateur de Jésus mais chaque personne doit pourvoir s´aider soi-même aussi. Si la personne est ignare, inconsciente, si elle ne porte pas le masque, ne fait pas l´isolement, ne se lave pas les mains correctement, Dieu dira : « Eh oh ! J´ai déjà trop de gens à aider mon fils. Prends-toi en main ».

Ce qui me fait dire que ce pays est complètement disloqué, désagrégé parce qu´il n´a tout simplement pas de gouvernement. Je le répète: ce pays ne dispose pas d´un gouvernement.

Ce pays ne prend pas soin de son économie, ne se soucie pas de l´emploi, ne veille pas aux salaires, ce pays ne soutient pas la santé, ne s´inquiète pas de l´environnement, ne développe pas l´éducation, n´accorde pas d´attention aux jeunes, ni encore moins aux enfants des banlieues. Mais alors, ce gouvernement, de quoi s’occupe-t-il ?

Depuis combien d´années, vous, camarades, dirigeants syndicaux, depuis quand vous n´écoutez plus le mot investissement, développement, création d´emplois et distribution de rente ? Il y a belle lurette !

Je ne sais si la Centrale Unique des Travailleurs (CUT) a déjà publié le document, si elle s´est déjà réunie avec le mouvement syndical, mais il y a une chose qui depuis longtemps me semble devoir être produite, et finalement il parait que le Dieese[3] l´ait fait…vous vous souvenez lorsque le Parquet avait utilisé les médias pour écouler son « grand exploit » : Avoir récupéré 4 milliards à la Petrobras ?

Vous n´avez pas arrêté d´entendre cette rengaine: “Ah, Dallagnol ira à la télé Globo pour dire qu´il a récupéré 1 milliard, 2 milliards ». Avez-vous une petite idée du préjudice porté par l´opération Lavage Express, je parle de l´opération Lavage Express. L´opération Lavage Express aurait pu mettre en prison le propriétaire de l´entreprise s´il est de fait un voleur, mettre sous les verrous le politicien s´il est de fait une canaille tout en maintenant les entreprises en activité.

Car, en fin de compte, juste pour que vous ayez une idée, du fait de l´opération Lavage Express, le Brésil a perdu la possibilité de recevoir un investissement de 172 milliards de reais. Juste pour cause de l´opération Lavage Express. Selon cette étude du Dieese, le pays a perdu 4 millions de postes de travail. Je ne parle pas des 14 millions de chômeurs, ce que je veux dire c´est qu´à cause de l´opération Lavage Express, de la destruction qu´elle a causé dans la chaine créatrice d´emplois au Brésil, elle est la cause immédiate de la perte de 4 millions et 400 mille emplois.

Juste dans le bâtiment ce sont 1 million cent mille. Si vous vous penchez sur la chaine de production de pétrole et gaz, de l´industrie navale, de l´industrie métallurgique, vous verrez combien de millions d´emplois elle a détruits…

Et personne n´en a jamais dit un mot. Aucun institut n´a eu le courage de publier quels ont été les dommages, les pertes irréparables pour ce pays. Ce pays qui au temps où le PT était au pouvoir, s´était élevé au rang de sixième économie mondiale.

Je me souviens qu´à Copenhague, lorsque se jouaient les olympiades, je blaguais avec mes homologues français et anglais: « Ne soyez pas surpris si bientôt on va vous dépasser et menacer l´Allemagne ». Soyez à vos postes parce que le Brésil n´est pas né pour être petit, il a vu la lumière pour devenir grand.

C´est une évidence qu´il y ait des gouvernants qui pensent en grand, et d´autres, qui, parce qu´ils sont mesquins, pensent en petit. Ce pays a été la sixième économie globale. Dans toutes les enquêtes d´opinion c´était le pays le plus admiré au monde, là où le peuple était le plus heureux, où il croyait le plus en l´avenir.

C´était un pays hautement respecté par la Chine, par la Russie, par l´Inde, par l´Allemagne, par la France, par l´Angleterre et par les États-Unis. Ce pays avait un projet de nation. Ce pays, qu´a-t-il aujourd´hui ?

Vous n´avez jamais entendu de ma bouche le mot privatisation. Qui pense qu´il n´y a que l´initiative privée qui compte ?

Une entreprise d´État comme la Banque du Brésil, une autre entreprise publique, la Petrobras, bien gérée comme elle l´a été durant notre gouvernement, s´est transformée en la quatrième entreprise d´énergie plus importante au monde.

Petrobras investissait 40 milliards de reais par an. Nous n´avons pas découvert les gisements du  « pré-sal » pour exporter du pétrole brut. Nous avons découvert les gisements du « pré-sal » pour exporter des dérivés, pour que le Brésil ait une industrie pétrochimique au Brésil.

C´est pour cela que nous avons inscrit la phrase : « Le pré-sal est notre passeport vers le futur ». C´est pour cela que nous avons réservé 50% de ses royalties à l´éducation, que nous avons pensé à créer un fond du peuple brésilien. Tout est en train d´être détruit.

Ils ont vendu notre entreprise de distribution BR, nous ne savons pas à qui ils l´ont vendue. Une entreprise qui a collecté 70 milliards de reais en 2019 a été vendue à 3 milliards 900 mille de reais.

Vous avez déjà vu Guedes dire un mot sur la croissance économique, sur le développement, sur redistribution des revenus ? Non, son mot d´ordre est vendre. « Nous allons vendre ». Mais lorsqu´ils vendront tout et qu´ils auront dépensé l´argent en dépenses courantes, le pays se retrouvera encore plus appauvri.

Le PIB ne va pas croître mais la dette continuera de le faire. Car, arrêter de dépenser sur ce qui est nécessaire n´est pas le bon chemin pour réduire la dette. En effet, si tu dois investir en éducation et en santé, si tu dois investir en transport et infrastructure, tu dois y mettre de l´argent.

Ce qui fera notre dette diminuer par rapport au PIB c´est la croissance économique, c´est l´investissement public. De fait, quelle est la logique de l´investissement public ? Si l´État ne fait pas confiance à sa politique et n´investit pas, pourquoi les chefs d´entreprise devraient le faire ?

Je vais vous dévoiler une donnée dont vous n´êtes peut-être pas au courant, je vais vous raconter car je suis ici dans le syndicat.

Lorsque ce pays avait pour président de la République un métallo en 2008, l´industrie automobile vendait 4 millions de voitures par an dans ce pays. Passés 13 ans, ce pays vend 2 millions de voitures. Ce qui revient à dire que l´industrie automobile représente la moitié de ce qu´elle était en 2008. Rien d´étonnant, il n´y a pas de possibilité d´investissement s´il n´y a pas de demande. Pour qu´il y ait de la demande, il faut qu´il y ait de l´emploi.

Pourquoi croyez-vous que le PT soit en train de lutter pour une aide d´urgence mensuelle de 600 reais ? Ce n´est pas parce que nous voudrions que l´État paye 600 reais jusqu´à la fin des temps. L´État ne peut arrêter de payer que lorsqu´il sera en train de créer des emplois et que les gens aient accès au revenu par leur travail, là, l´aide d´urgence ne sera plus nécessaire.

Mais lorsque le gouvernement ne soucie guère de l´emploi, des salaires, ne s´inquiète pas du revenu, il faut qu´il y ait une aide d´urgence pour que les gens ne soient pas sur le pavé. Vous n´avez pas besoin de lire Marx pour le comprendre, pas besoin de lire Delfim Neto non plus. Cette rationalité elle est présente au sein de n´importe quel ménage.

Si la femme dispose d´argent – que votre femme et votre famille aient de l´argent – elle ira au supermarché, au marché, elle ira acheter un nouveau cahier, de nouvelles chaussures et tout se mettra à tourner. Mais si elle n´en a pas, elle restera prostrée à la maison, face à la poêle en attendant : « Quand est-ce que j´aurais de l´argent pour acheter quelque chose ? »

Le Brésil ne lui appartient pas, à lui, Bolsonaro, ni encore moins aux miliciens. Le Brésil appartient à 230 millions de personnes. Ces personnes veulent travailler, manger, habiter, avoir accès aux loisirs.

En effet, pour gouverner un pays…un président de la République doit parler aux syndicalistes. Il est impensable qu´un président de la République ne s´adresse pas à la force de travail.

Un président se doit de s´adresser aux hommes d´affaires et il me semble que Bolsonaro n´adresse la parole qu´au perroquet de la Havan[4]. Le perroquet d´Ana Braga est mort, le perroquet José, mais il y a là le perroquet de Havan, on dirait qu´il s´agit juste de bavardage car il n´y a pas de réunion productive avec les chefs d´entreprise.

J´avais un conseil de 100 personnes auquel participaient les dirigeants des syndicats, les grands entrepreneurs, des indiens, des pasteurs d´église évangélique, des prêtres, des évêques, des noirs. Car je voulais entendre la société. Nous avons organisé durant mon mandat 74 conférences nationales pour écouter les aspirations de la société.

Bolsonaro, lui, à part les miliciens, il ne rassemble personne. Il ne se présente pas aux entrevues. Lorsqu´il quitte le palais, c´est pour dire : « Je suis en train de libérer la vente des armes à feu, vous aurez droit à 4 revolvers, plus deux fusils et bientôt il y aura des canons à la disposition de tous».

Ce peuple n´a pas besoin d´armes à feu, David. Il lui faut des emplois, des contrats de travail, des salaires, des livres, de l´éducation. L´État doit être présent dans les banlieues de ce pays. L´État doit y être avec de l´éducation, de la culture, de la santé et de la politique d´assistance sociale. Voilà le rôle d´un président de la République.

Est-ce que Bolsonaro n´a rien lu sur ce que l´on a fait ? Toi, Haddad, tu n´as produit aucune brochure accessible à Bolsonaro ? Nous avons produit tellement d´abécédaires ! Le PC do B n´aurait pas par hasard un abécédaire en main disant qu´il est possible de gouverner différemment pour envoyer à Bolsonaro ? Ô Miguel, tu peux en faire une de ces brochures explicatives à la Force Syndicale et Sergio, en faire une autre de la CUT pour qu´il sache que c´est possible !

Le Brésil n´est pas le propre de Bolsonaro. Le Brésil n´est pas le bien des miliciens. Le Brésil appartient à 230 millions de personnes. Ces personnes veulent travailler, manger, habiter, avoir du loisir.

Vous n´avez pas idée de combien j´étais heureux lorsque je voyais un travailleur montrer un gigot et me dire : « Je vais manger ce gigot et prendre une bière ». C´était fantastique.

Vous n´avez pas idée du bonheur procuré par l´idée que le petit producteur de ce pays, représenté ici par le camarade João Paulo du Mouvement des Travailleurs Sans-Terre, pouvait produire et savoir que ses produits avaient les prix garantis, qu´ils n´allaient pas périmer dans sa cave, au soleil ou sous la pluie.

Nous achetions ces produits et nous les distribuions si nécessaire, mais nous devions construire un stock régulateur qui assurait la stabilité des prix. Mes amis, comment le gaz de cuisine peut-il coûter 105,00 reais ? Comment l´oignon peut augmenter 60% et la tomate encore je ne sais combien ? Comment l´électricité peut-elle augmenter tellement ?

Et le prix de l´essence ? Comment ça se fait ? Ô David, toi qui es ouvrier pétrolier, je vais profiter de ta présence pour dire quelque chose. Pourquoi permettre au prix du combustible brésilien de suivre les prix internationaux si nous ne sommes pas importateurs de pétrole ? Le Brésil est exportateur !

Si la matière première est produite ici, si nous sommes capables de l´extraire du fond de la mer, si nous réussissons à la raffiner localement…nous produisons du combustible pour les avions, nous produisons du diesel et nous le faisons avec la même qualité de l´Union Européenne.

Avant que je n´arrive à la présidence et peut-être vous ne le savez pas car la presse ne l´a jamais révélé, notre essence avait 1500 ppm de particules par…je ne sais plus par combien, par million, quelque chose du genre. Je ne suis pas spécialiste mais je me souviens parfaitement.

Nous l´avons ramenée à 50, standard européen, vous savez ce que c´est ? Standard européen pour que lorsque vous serrez en train de marcher dans la rue – il ne faut pas le faire, juste de temps en temps – vous ne respiriez pas le gaz carbonique d´une essence et d´un diesel pollué. Nous avons élevé nos raffineries au standard mondial. Et maintenant nous importons du carburant et du diesel des États-Unis. Ce n´est pas logique.

En 1953, lors de la fondation de Petrobras, le journal O Estado de São Paulo et son éditorial publiait des articles faisant passer l´idée que le Brésil était ignare, que le Brésil ne devait pas produire du pétrole, qu´il n´en avait pas besoin, qu´il devait en acheter des États-Unis.

Maintenant nous sommes revenus à 1953 : le Brésil possède la matière première et….Vous êtes jeunes et peut-être vous ne vous en souvenez pas mais quand nous avons découvert les gisements du « pré-sal », savez-vous ce que disait cette journaliste de la chaine Globo, Miriam Leitão ? Elle s´exprimait en ces termes : « Oui, on a découvert le « pré-sal » mais on ne peut l´exploiter car on n´a pas la technologie et le prix du baril serait trop cher ». Tu t´en souviens David ? Elle le disait sans rougir.

Non seulement nous exploitons le pétrole qui se trouve à 6-7 mille mètres de profondeur comme le coût du baril en mer profonde est d´à peine 1 dollar de plus que le baril de l´Arabie Saoudite dont le pétrole se trouve presque en superficie. Vous avez idée de ce que ça signifie ?

C´est le reflet direct de l´investissement que nous avons fait en recherche et technologie pour la Petrobras. C´est la raison pour laquelle il y a eu le coup d´État contre Dilma, parce qu´ils ne veulent pas qu´il y ait du pétrole ici et qu´il soit dans la main des brésiliens. Il faut qu´il appartienne aux américains car ils doivent avoir un stock pour la guerre.

Avec la 2ème guerre mondiale, ils ont compris que pour gagner la guerre il était obligatoire de disposer d´un grand stock de combustible, ils savent que l´Allemagne a perdu la guerre parce qu´elle n´a pu arriver à Baku et avoir accès aux carburants.

C´est l´une des raisons pour lesquelles les pays riches ont tous un grand stock de combustible. Tous. Et nous qui sommes un immense pays, un pays qui domine la plus importante technologie en prospection de pétrole en eaux profondes, nous sommes en train de nous défaire de tout cela pour pouvoir répondre aux intérêts du « Dieu marché » du pétrole.

L´économie va mal et le Covid-19 est en train de s´accaparer du pays. La souche de Manaus est agressive, elle est 10 fois plus contagieuse que l´autre souche, et tue au moins deux fois plus, du moins c´est ce que j´ai entendu les scientifiques dire.

Ce pays pourrait faire des recherches en vaccins, il pourrait même produire des vaccins. Quand la H1N1 a débarqué, dans les années 2000, j´étais président de la République et nous avons vacciné 80 millions de brésiliens en trois mois. Ce pays possède un système de santé capable de le faire.

Où se trouve Zé Gotinha [Zé Petite Goute]? Où est notre cher Zé Gotinha? Bolsonaro l´a renvoyé car il pensait qu´il était du PT. Mais il ne l´était pas ! Cette icône de la vaccination a été inventée par des gens très importants du système sanitaire de ce pays, il n´avait rien à voir avec le PT. Il était au-dessus des partis, c´était un humaniste. Où est Zé Gotinha ? C´est fini ?

J´aimerais que vous réfléchissiez.

Ce pays n´a pas de gouvernement, il n´a pas de ministre de la Santé, ce pays n´a même pas de ministre de l´Economie, ce pays a un fanfaron. Le président, parce qu´il n´est compétent en rien, dit toujours « c´est l´affaire de Guedes, c´est à lui qu´il faut s´adresser, c´est sa responsabilité ».

Venons à l´économie, vous savez bien que le pays est appauvri, le PIB a chuté, la masse salariale a dégringolé, le commerce en détail est en difficulté, la production d´aliments est en risque et le président, tout ça, ça ne le concerne pas. Le président se soucie d´autre chose : « Je dois vendre plus d´armes à feu. »

Il faudra que nous ayons encore beaucoup de Marielles[5]. Il le faut. Il doit donner sa garantie aux fermiers en disant : « Achetez des fusils, achetez des mitraillettes, si vous voyez un sans-terre devant vous, faites-le tomber sous les balles ».

Je me sens suffisamment jeune pour me battre. Alors, j´aimerais que vous sachiez que je ne lâcherai jamais, le mot renoncer ne fait pas partie de mon dictionnaire.

Comme disait Trump : « Si vous croisez quelqu´un au restaurant qui dit du mal de moi, frappez-le et je vous rembourserai les frais d´avocat ». Bolsonaro, lui, il assure les services de ses miliciens.

Finalement, chers et chères camarades, je voulais vous dire que lorsque vous atteignez l´âge qui est le mien et quand vous obtenez de Dieu la générosité que j´ai reçue, il n´y a pas d´espace pour la rancœur et la haine ; je dirais qu´il n´y a plus de temps à perdre à ruminer la rage ou la haine. J´ai été béni par Dieu dans beaucoup de choses.

D´un point de vue sociologique ou philosophique – ça te va Boulos, quand je dis sociologique ? – si nous en faisions l´analyse, nous n´aurions pas fait – n´est-ce pas Nobre ? – une telle révolution en créant un nouveau syndicalisme en 78, parce qu´il semblait alors impossible de créer quoi que ce soit et nous l´avions fait.

Nous n´aurions pas pu élaborer la liberté d´organisation partidaire et je n´aurai pas eu le plaisir de créer le parti le plus important de la gauche latino-américaine et encore moins devenir président.

Vous vous souvenez, lors de ma première candidature à l´élection présidentielle, mes concurrents étaient, rien de moins que, le Dr. Ulysses Guimarães, le Dr. Leonel de Moura Brizola, avec le Dr. Paulo Salim Maluf, le Dr. Mario Covas, le Dr. Afif et le Dr. Aureliano…ils étaient tous des docteurs.

L´unique qui n´était pas docteur c´était moi et ceci ne m´a pas empêché d´aller au deuxième tour. Si je n´ai pas gagné c´est parce que Globo m´a volé ma victoire. Globo avait mis sur scène cette tricherie du débat qui a d´ailleurs été reconnue par les directeurs de la chaine après.

Alors, Dieu m´a béni et j´aimerais finir par vous dire que je suis bien dans ma peau et heureux de ma vie. L´opération Lavage Express a cessé d´exister pour moi. Je n´attends pas que les gens qui m´accusent arrêtent de le faire, non je ne m´y attends pas.

Je suis satisfait de voir que ce que disaient mes avocats depuis longtemps – le président est innocent, le président n´est pas propriétaire de l´appartement – ait été reconnu.

Nous avons fait tomber 11 procédures judiciaires en 5 ans. En d´autres mots, nous avons eu 100% de succès avec la décision du juge Fachin. J´étais accusé dans quatre procès et tout d´un coup ils ont disparu. Pourquoi Fachin ne l´a pas fait avant ? Ça fait 5 ans que j´affirme toujours les mêmes choses.

Je sais que c´est très gênant pour tous ceux qui m´ont accusé, d´arrêter de le faire. C´est dur car lorsque vous choisissez le chemin du mensonge, c´est difficile de revenir en arrière. Mais regardez comment je suis beaucoup plus serein que William Bonner [speaker de Globo] hier, lorsqu´il transmettait la nouvelle. Voyez comment mon expression transmet cette sérénité, la certitude de ce que la vérité a eu gain de cause, qu´en fine, elle prévaudra.

C´est la raison pour laquelle, chers camarades, je souhaite me mettre au service de la cause durant le temps de vie qui me reste et j´espère qu´il sera encore bien long. On commence à aimer la vie quand le ciel nous devient plus proche. J´aimerais parcourir de nouveau ce pays pour parler au peuple.

Le peuple n´a pas le droit de permettre qu´un citoyen qui provoque tant de mal, comme Bolsonaro, continue de gouverner et de vendre le pays. Je ne sais quelle attitude mais nous devrons en prendre une, chers camarades, pour que ce peuple se reprenne à rêver.

Ce pays a déjà rêvé, il a déjà réalisé. Mes amis, nous rêvions de faire du Brésil un grand pays. Nous avons construit et consolidé le Mercosul. Nous avons bâti l´Unasul parce que nous voulions créer un grand bloc économique latino-américain, un bloc de 400 millions d´habitants, fort d´un PIB important afin de négocier dans des conditions d´égalité avec l´Europe.

Parce que l´Europe n´est intéressée de négocier que lorsqu´il s´agit de nous vendre ses produits industriels et d´acheter en contrepartie nos produits agricoles. Non, nous ne voulons pas faire de l´agrobusiness la principale activité nationale. Nous respectons l´agrobusiness, notre agrobusiness bénéficie de beaucoup de technologie, il est très important, mais le Brésil veut être un pays industrialisé. Le Brésil veut acquérir de nouvelles industries, le pays aspire à de nouvelles technologies.

N´ayez pas peur de moi, si je suis radical c´est parce que je veux aller à la racine des problèmes. Je suis radical car je veux aider à construire un monde juste. Un monde plus humain.

Nous rêvions de cela. Nous avons créé les Brics, nous avons fondé la Banque des Brics, nous avons créé la banque du Sud. Le Brésil avait un projet de nation, avait un projet de souveraineté. Car notre découverte, elle s´est faite il y a déjà trop longtemps, plus de 500 ans !

Quand est-ce que nous allons enfin prendre soin de nous-mêmes ? Quand est-ce que je vais me réveiller le matin sans avoir à demander la permission de respirer au gouvernement américain ? Quand pourrais-je me lever le matin sachant que mon peuple peut prendre son petit-déjeuner, qu´il ira déjeuner et dîner, que ses enfants sont à l´école, que ses enfants ont accès à la santé et à la culture ? Quand allons-nous nous réveiller ? Ce ne sont pas des rêves en l´air, tout ça est à la portée de nos mains, nous l´avons prouvé.

Alors, chers et chères camarades, c´est la possibilité même de construire et de pouvoir matérialiser ce rêve qui me fait sentir si jeune. Je me sens suffisamment jeune pour lutter intensément. Ainsi, j´aimerais que vous le sachiez, renoncer jamais, le mot renoncer ne fait pas partie de mon dictionnaire.

Je l’ai appris de ma mère ; lutter toujours, sans cesse y croire, essayer en permanence car si l´on ne croit pas en soi même, personne ne le fera. Si vous ne vous respectez pas, personne ne le fera.

À tous ceux qui m´ont ravilit durant toutes ces années, j´aimerais leur faire passer le message suivant : Je veux parler à la classe politique. Parce que très souvent – n´est-ce pas Haddad ? -, il n´est pas rare – n´est-ce pas Boulos ? – que nous nous refusions de discuter avec certains politiciens, cela fait partie de notre nature.

Cependant, quand bien même je souhaiterais de ne voir à l´Assemblée Nationale que des gens bien, des gens engagés à gauche, des gens progressistes, ce n´est pas le cas. Le peuple n´a pas réfléchi de la sorte. Le peuple a élu ceux qu´il a bien voulu élire. Nous devons nous adresser à tous ceux qui sont là-bas pour voir comment restaurer ce pays.

Je dois parler aux hommes d´affaires. J´aimerais savoir où le bât blesse, saisir pourquoi il leur est si difficile de comprendre que s´ils veulent croître économiquement, s´ils veulent voir la bourse grimper, s´ils veulent voir l´économie progresser, il faut garantir au peuple de l´emploi, que le peuple ait de la rente, que le peuple puisse vivre avec dignité, faute de quoi, il ne peut y avoir de croissance.

Serait-il si difficile de le faire ou est-ce que nous serons éternellement des otages du « Dieu marché » qui n´aspire qu´à gagner de l´argent, peu importe comment ?

Nous avons déjà eu l´expérience de la crise de 2008 avec le subprime américain et après la faillite de Lehman Brothers. Eh bien, lorsqu´ils font faillite, qui vient investir de l´argent pour les sauver ? L´État ! L´État qu´ils rejettent, l´État qu´ils détruisent. Quand ils déposent le bilan, c’est l´État qui est là pour les sauver.

Aux États-Unis quand le système immobilier était en banqueroute du fait de la bulle résultant du subprime, ils ont d´abord aidé les banques pour ne penser qu’ensuite à tous ceux qui ont perdu leurs maisons. Quand allons-nous enfin penser à tous ceux qui occupent l´étage d´en dessous ?

Alors, n´ayez pas peur de moi. Je suis radical car je veux aller à la racine des problèmes qui accaparent ce pays.

Je suis radical car je veux aider à construire un monde juste. Un monde plus humain. Un monde dans lequel travailler et demander une augmentation de salaire ne soit pas un crime. Un monde où la femme ne soit pas rabaissée juste parce qu´elle est une femme. Un monde où les personnes ne soient pas méprisées du fait de leurs rêves. Un monde où l´on puisse abolir définitivement le maudit préjugé racial dans ce pays. Un monde où il n´y aurait plus de balles perdues. Un monde où les jeunes [des banlieues] pourront circuler librement dans n´importe quelle rue sans avoir à craindre de se faire tirer dessus.

Un monde où les gens seront heureux là où ils le voudront, où les personnes pourront être ce qu´elles projettent d´être. Un monde où nous devons respecter la religiosité de chacun, où chacun sera ce qu´il voudra, où il aura la spiritualité qu´il voudra avoir. Personne n´est obligé d´avoir la même religion que moi, ayez la religion que vous voudrez, choisissez celle qui inspire votre croyance. Une personne peut se définir comme LGBT et nous nous devons de la respecter. Ce monde est possible, il est tout à fait possible.

C´est ainsi que je vous invite vous tous, pour que nous luttions ensemble afin que tout brésilien, indépendamment de son âge, soit vacciné.

A ce titre, nous devons obliger le gouvernement à acheter des vaccins et simultanément, nous devons lutter pour une aide d´urgence sans oublier qu´il est indispensable de se battre en faveur des investissements créateurs d´emplois, priorité faite à ceux en infrastructures.

Nous devons livrer bataille en faveur d´une politique d´aide aux micro-entrepreneurs et aux entrepreneurs brésiliens qui sont à bout, pour beaucoup, en dépôt de bilan. Combien de restaurants sont en train de fermer ? Combien de pharmacies ? Combien de blanchisseries, d´instituts de beauté ne sont pas en train de fermer leurs portes ? A quoi sert un gouvernement ? Pour essayer d´offrir des solutions à tous ceux qui sont face à ces difficultés.

Alors mes amis, je voudrais ici m´excuser, parce qu´à l´image du juge Gilmar Mendes, moi également, je me suis épanché longuement aujourd´hui. Mais vous devez convenir que ça fait 5 ans que je ne parle pas à la presse.

Savez-vous quelle a été la dernière fois que j´ai donné une entrevue à la télé ? C´était il y a 5 ou 6 ans, à Roberto d´Avila, à la chaine Globonews. C´était il y a 4 ans.

Je suis devenu une sorte de virus : ne touchez pas à Lula, n´écoutez pas Lula. Une fois j´avais été condamné à trois ans de prison à Manaus. Savez-vous quelle était mon arme ? Le juge avait dit que j´avais une langue de vipère. J´aimerais alors que vous sachiez que si c´est pour défendre le peuple brésilien, pour défendre les choses qui iront sauver ce pays, je garderai ma langue de vipère.

En finale je tiens à vous remercier car, sans vous, je ne serai probablement pas arrivé ici.

Merci infiniment.

[1] Boulos, leader du Mouvement des Sans Toit et membre du PSOL. Le Mouvement des Sans Toit avait envahi le triplex en avril 2018 pour démontrer qu´il n´appartenait pas à Lula.

[2] Janja est l´actuelle compagne de Lula

[3] DIEESE: Département Intersyndical de Statistique et d´Études Socioéconomiques

[4] Il se réfère à Luciano Hang, homme d´affaires proche de Bolsonaro.

[5] Marielle Franco, Conseillère Municipale de Rio de Janeiro, engagée contre le racisme, l´homophobie et les violences policières abattue le 14 mars 2018.

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